Page:Ivoi - Les grands explorateurs. La Mission Marchand.djvu/78

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Là… Là… mon capitaine… Là… sergent.

Du doigt, le tirailleur montrait sur le fleuve une masse flottante :

— Un cadavre : murmurèrent les deux Français.

— Porteur d’ici… pati la nuit, expliqua le factionnaire.

— Oui, peut-être, répliqua l’officier ; profitons de cet incident.

Bernard, faites l’appel des hommes.

En un instant, toute la petite troupe fut réunie.

On appela les noms. Il manquait un porteur.

Alors Baratier s’adressant aux engagés :

Celui-là a trahi, leur dit-il ; vous voyez comment il est puni… Rompez.

Cette courte harangue consterna les porteurs ; ils regardèrent le cadavre de leur camarade, qui leur faisait comprendre l’impossibilité de la fuite.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il y avait trois jours que Baratier et son escorte séjournaient sur l’îlot.

On avait vainement tenté de creuser des canaux pour franchir la barre de vase ; il semblait que les eaux eussent baissé, car l’obstacle était plus infranchissable encore qu’au début. Le sable était devenu compact, très dur même à creuser, en certains endroits.

La situation devenait critique. La viande des crocodiles était épuisée. On n’avait plus revu de sauriens, sans doute le bruit de la fusillade les avait effrayés. Il fallait toucher à la suprême réserve de vivres gardée pour le retour.

Baratier et le sergent Bernard seuls avaient conservé l’énergie morale nécessaire pour résister aux épreuves.

Le découragement avait gagné les hommes, gagnant même les tirailleurs.

Trois porteurs, qui avaient essayé de gagner la rive, avaient péri sous les yeux de leurs camarades.

Le fond vaseux était mouvant de ce côté.

Et les jours passaient lents, interminables.

Le quatrième, le cinquième… Il fallait toujours entamer les vivres.

On rationna les hommes malgré leurs murmures. Décidément l’avenir s’assombrissait de plus en plus.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .