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on verra, en Afrique surtout, qui est en quelque sorte un prolongement du sol de la mère patrie, on verra, dis-je, des Français s’installer, s’enrichir, faire souche de colons, assurer la conquête pacifique.

Et, avec mélancolie, le commandant ajouta :

— À ce moment, il n’y aura plus de gens, comme il s’en trouve aujourd’hui, pour nous faire un crime de risquer notre existence, afin d’assurer à la France la richesse dans l’avenir.

Marchand s’interrompit.

Un brusque arrêt venait de se produire dans la colonne.

— Qu’y a-t-il donc, interrogea-t-il ?

Presque au même instant, le sergent Dat, qui commandait l’avant-garde, accourut tout essoufflé.

— Commandant, cria-t-il du plus loin qu’il pensa pouvoir se faire entendre, le sentier est barré.

— Barré ?

Il se rapprocha, arriva devant le commandant, et, prenant, la position réglementaire :

— On a établi en travers du sentier, déblayé ces jours derniers par nos éclaireurs, des abatis d’arbres. C’est une véritable barricade, épaisse d’au moins, trois ou quatre cents mètres.

Le commandant haussa les épaules :

— En quarante-huit heures, le passage sera rétabli. Que l’on campe ici. Les porteurs seront employés comme ouvriers. Que l’on fauche tous les buissons dans un rayon de cinq cents mètres, afin que, la nuit, nos projecteurs électriques éclairent le terrain dénudé et s’opposent à toute surprise.

Puis, se tournant vers les officiers :

— Pour vous, messieurs, des reconnaissances dans toutes les directions. En avant des abatis surtout. Il s’agit de savoir si d’autres obstacles n’ont pas été créés, entre ce point et celui où nous pourrons reprendre la navigation.

Les capitaines Mangin et Baratier s’éloignèrent en courant, suivis par le sergent Dat qui communiqua aux divers gradés les instructions du commandant.

Une demi-heure plus tard, le campement était établi.

Des escouades de porteurs, armés de haches ou de sabres d’abatis, fauchaient les buissons à droite et à gauche du campement. Des arbustes coupés, d’autres formaient des fagots qu’ils allaient précipiter dans la rivière.