dominent les terres basses, les vallées de la Djouba et du Baro. Le 24 au soir, Marchand entre à Bouré, le premier poste abyssin qui garde la plaine. La colonne avait marché prodigieusement vite, si vite que les docteurs français de Couvalette et Chabaneix, qui faisaient de rudes étapes depuis trente-cinq jours, arrivent juste à temps pour recevoir le commandant. On s’embrasse, on se félicite, et l’émotion étreint tous les cœurs, en songeant à ce qu’on laisse derrière soi, après avoir tant souffert pour le conquérir !
La mission a passé une quinzaine de jours à Bouré, pour organiser sa caravane et elle fut reçue en grande pompe à Gore par Dedjaz Tessamma. Tous les chefs et tous les guerriers avaient revêtu leurs costumes d’apparat. Rien ne saurait donner une idée exacte de la large hospitalité offerte par le dedjaz éthiopien qui sera bientôt certainement nommé ras par Ménélick.
Tous les officiers de la mission se montrent émus, au souvenir des témoignages d’amitié qui leur furent si généreusement prodigués. Le commandant Marchand reçut, comme présents, un magnifique cheval gris-clair tout harnaché d’argent et les insignes du plus haut commandement militaire en Éthiopie, la lance d’honneur et le bouclier d’or. Chacun des officiers français reçut deux mules richement harnachées.
Tessamma offrit également des bêtes de somme pour le transport des bagages.
Le commandant Marchand donna en échange les canons de la flottille française, ce qui ravit le dedjaz.
Les vivres offerts par les chefs éthiopiens étaient si abondants, que les troupes de la mission ne parvenaient jamais à les consommer. Sur tout le parcours des territoires placés sous l’autorité de Tessamma, les Français trouvèrent, au bout de chaque étape, des baraquements construits à neuf pour leur coucher. Les boissons étaient aussi abondantes que les comestibles, le tetche (hydromel), était versé à discrétion.
Entre Gore et Addis-Abbaba, la marche de la colonne fut une suite continuelle d’ovations enthousiastes, les dames abyssines étaient les premières à acclamer nos officiers.
La campagne du Tigré étant terminée et le ras Mangacha Johannes ayant fait sa soumission, le Négus pensait être en sa capitale pour souhaiter la bienvenue et féliciter les braves de Fachoda ; mais l’armée abyssine marche lentement ; l’em-