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Est-il donc si long d’expliquer nos droits acquis à force de dévouement ?

Plus les jours passent, plus l’angoisse du commandant augmente.

Le silence du capitaine le brise.

S’il avait de bonnes nouvelles, une solution favorable, il câblerait à Alexandrie, au Caire.

Mais non, il ne peut câbler.

La ligne télégraphique ne se continue pas jusqu’à Fachoda.

Et l’officier ignore que son chef est là, au Caire, qu’il pourrait chaque jour le tenir au courant de ses démarches.

Nous voici arrivés au 5 novembre.

Le commandant se rend au télégraphe.

Il adresse une dépêche angoissée à Baratier.

Et il attend la réponse le soir, le lendemain.

Mais la journée s’achève sans amener la réponse désirée.

Aux questions de Marchand, les employés répètent invariablement :

— Une dépêche de France, pour le commandant Marchand ? Nous n’avons pas vu cela. Rien… Toujours rien.

Et le chef de la mission Congo-Nil s’exaspère.

Il ignore que Baratier a quitté Marseille le 4 ; que maintenant il est à bord d’un paquebot marchant à toute vitesse vers Alexandrie et dont l’hélice puissante se tord sous les eaux comme si elle partageait l’anxiété fiévreuse du passager, l’attente désespérée de celui qui est resté au Caire.

Les jours passent encore.

Le commandant maintenant s’est dit :

— Baratier doit être en route.

Il adresse à Alexandrie des télégrammes au capitaine Baratier, à bord de tous les paquebots venant de France.

— Je suis au Caire. Dès votre arrivée, accourez.

Enfin un après-midi, vers quatre heures, le commandant, brisé par la lutte intérieure qu’il soutient, descend vers le fleuve.

La brise fraîche du soir va souffler ; elle rafraîchira son front brûlant, elle apaisera le bouillonnement de son sang, qui court, ruisseau de lave, dans ses veines.

Il va. Oh ! s’il pouvait rêver, rêver toujours, ne plus se souvenir de l’odieux point d’interrogation qui l’opprime.

Il va.