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bouteilles de vin ; je suis profondément touché de cette délicate attention, quoique nous soyons abondamment pourvu de tout. Permettez-moi de vous offrir, en échange amical, le modeste produit de nos jardins, dont vous devez probablement manquer à Ondourman.

Veuillez agréer, etc.

Marchand.

Et puis, le sirdar disparut remontant vers le Nord, allant chercher la moisson d’honneurs et d’argent que les Anglais, ivres d’orgueil et de joie, ne lui marchandèrent pas.

Cet homme qui avait vaincu des bandes mal armées, sans pertes appréciables, fut proclamé un héros. On le félicita de la façon dont il avait traité les bandits français de Fachoda.

Nul éloge, nulle récompense ne semblaient assez grands pour lui.

Et pendant ce temps, les deux cents braves de la mission Congo-Nil demeuraient à Fachoda, l’arme au pied, en face du bataillon anglais commandé par le major Jackson.

C’étaient les tracasseries journalières de deux pouvoirs rivaux, se heurtant à tout instant.

La situation était rendue plus pénible encore par la morgue anglaise. Le succès décisif leur semblait si certain, que vraiment ils eussent regretté de refréner leur insolence.

Mais le commandant, inébranlable dans son devoir, opposait à toutes les piqûres d’épingles, à toutes les taquineries, un sang-froid stoïque.

Maintenant sans doute les gouvernements délibéraient.

Il ne fallait pas créer de difficultés au cabinet français en écoutant les conseils de la colère.

Non, on aurait, et jusqu’au bout, le plus grand des courages, celui de supporter les pires blessures, celles qui font saigner l’amour-propre.

Et l’on offrirait ces souffrances nouvelles à la France, la patrie bien-aimée.