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Une averse de fonte couvrait Fachoda.

Mais les derviches avaient en face d’eux le commandant Marchand et deux cents tirailleurs armés d’excellents fusils.

De suite, le chef de la mission avait compris la nouvelle tactique des ennemis.

Ils avaient bien raisonné.

Attendant des adversaires venant du Nord, le commandant avait accumulé de ce côté les moyens de défense.

Comme le temps et les travailleurs lui avaient manqué, tout naturellement la partie sud de la ville s’était trouvée négligée.

Dans cette direction, une troupe assaillante ne rencontrerait pas d’obstacles sérieux.

Si les mahdistes parvenaient à débarquer en amont de Fachoda, la colonne de Marchand serait fatalement vaincue par un ennemi si supérieur en nombre.

Mais, à ses qualités de courage et de volonté, l’officier joint un rare sang-froid.

Il n’hésite pas.

C’est sur le Nil qu’est le véritable danger.

C’est à la flottille qu’il s’agit de faire face avec toutes ses forces disponibles.

Il appelle un sergent qui est à dix pas de lui.

— Sergent !

Le gradé s’approche vivement :

— Mon commandant !

— Prenez huit hommes, jetez-vous dans les maïs… et un feu d’enfer. Il faut faire croire aux troupes débarquées qu’elles se heurtent à une force considérable.

— Bien, commandant.

— Et tenez bon jusqu’à ce que nous en ayons terminé avec les embarcations.

— Compris, commandant. Si l’on ne tient-pas c’est qu’on sera mort.

C’est Bernard qui prononce si simplement ce mot héroïque.

Il court au retranchement.

Il va lever une escouade.

Et, entraînant ses huit hommes dans ses traces, il disparaît avec eux dans les hautes tiges feuillues des maïs, que leurs longs épis font pencher vers le sol.