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Sur un signe du commandant, Mangin replaça le mouchoir sur les yeux du mahdiste et, le reprenant par le bras, le ramena à l’endroit où stationnait le canot qui l’avait apporté.

Là, le madhiste bondit dans la barque et, comme elle s’éloignait du rivage.

— Adieu, dit-il, toi qui vas mourir.

Le capitaine haussa les épaules et rejoignit Marchand.

La bataille était imminente.

Chacun le sentait. De leurs postes de combat, officiers et tirailleurs suivaient du regard le léger canot qui se rapprochait rapidement de la flottille madhiste.

Il l’atteignit enfin et disparut derrière la coque de l’un des vapeurs.

Un quart d’heure s’écoula.

Puis, soudain, une volute de fumée blanche se développa à l’avant du Sofia ; une détonation retentit et, quelques secondes plus tard, un obus éclatait à gauche du retranchement, sans atteindre personne.

La canonnade continua, tandis que plusieurs chalands ralliaient la rive et y débarquaient les soldats enfermés dans leurs flancs.

À peine ces troupes se mirent-elles en mouvement que le commandant fit ouvrir le feu.

Sous la pluie de balles, les assaillants hésitèrent.

Ils se tapirent dans des champs de maïs qui, nous l’avons dit, forment la principale culture de la région.

Cette fusillade nourrie troublait les projets des mahdistes.

À bord du Sofia, le chef de l’expédition, le marabout Alder, appela aussitôt le bey qu’il avait dépêché le matin vers les Français.

— Tu as vu leurs retranchements ; demanda-t-il.

— Oui. Tout en transmettant tes ordres à ces blancs, j’ai examiné de mon mieux.

— Eh bien ?

— Il m’a semblé qu’ils avaient surtout fortifié leur position au Nord.

— Au Nord, dis-tu.

— Oui, ils supposent ainsi barrer la route du fleuve.

— Barrer, les fous, ils n’ont pas d’artillerie.

— Je n’ai rien aperçu de semblable.

Le marabout leva la main.