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d’incessantes escarmouches avec les tribus dont les territoires se trouvaient sur leur route.

Mais au bord de la rivière, le convoi, encombré de malades, sans vivres, dut s’arrêter.

Continuer la route par terre devenait impossible et, pour la poursuivre par eau, des bateaux étaient nécessaires.

Or, par un hasard étrange — évidemment préparé par les agents britanniques, — les reconnaissances qui longèrent la rivière sur une étendue de plus de cent kilomètres, n’aperçurent pas une seule pirogue.

Le fait se passe de commentaires.

L’absence d’embarcations dans une région dont les habitants sont surtout pêcheurs trahit le plan longuement mûri d’avance dans les bureaux de l’Amirauté anglaise.

Et l’état de l’expédition s’aggravant de jour en jour, M. de Bonchamps, pour éviter un désastre, fut contraint de revenir sur ses pas.

Désormais Marchand serait isolé à Fachoda.

Or, le 11 juillet 1898, le commandant ignorait tous ces détails, et il s’étonnait que la mission Djibouti-Nil ne fût pas au rendez-vous ; qu’elle n’eût pas eu le temps de parcourir 2.000 kilomètres, alors que lui en avait franchi environ 5.500.

Telle est, en effet, la distance de Loango à Fachoda, distance qui assure, et de plusieurs longueurs, le record de l’exploration africaine à l’expédition Marchand.

Les plus longues, en effet, après celle-ci sont :

xxxxLe voyage de Stanley : 3.300 kilomètres.
xxxxL’exploration Monteil : 4.500 kilomètres.

Par ces quelques chiffres, on voit que nos officiers ont laissé bien loin derrière eux leurs concurrents étrangers.

Le commandant songeait donc.

Soudain son attention fut attirée par le cortège bariolé du cheik Ra-Moeh.

En un instant il se ressaisit et attendit, les yeux fixés sur les Chillouks.

Ra-Moeh, parvenu à trois pas de l’officier, s’arrêta.

Il éleva ses mains, réunies en forme de coupe, au-dessus de sa tête, et d’une voix papelarde :

— Je te salue, chef. Allah a tourné son visage vers ses