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Mais le Mahdi se trouvait éloigné de plus de deux cents kilomètres, tandis que les blancs occupaient la ville.

Il fallait ruser.

En vertu de ce raisonnement, le cheik Ra-Moeh se revêtit de ses plus riches vêtements et, suivi par une dizaine de serviteurs, chargés de corbeilles emplies de fruits et de rafraîchissements, il se porta au-devant du commandant.

Debout sur le rivage, celui-ci, la tête penchée, était absorbé par des réflexions pénibles.

Il avait réussi, lui, à accomplir la marche la plus extraordinaire du siècle. Il était arrivé à Fachoda, point désigné d’avance comme terme de la mission, et il n’y trouvait pas ceux qu’il espérait y rencontrer.

Car, tandis qu’il s’avançait du Congo vers le Nil, il savait qu’une autre mission partie, elle, de Djibouti, devait traverser le Harrar, descendre la rivière Sobat, affluent de la rive droite du Nil et occuper Fachoda, fermant ainsi le bras français de la croix africaine.

Il ignorait que là, les intrigues anglaises avaient remporté un premier succès.

La mission Djibouti-Nil avait été mise tout d’abord sous les ordres de Bonvalot, l’illustre et énergique explorateur du Thibet, dont nous raconterons bientôt l’odyssée, puis à la suite de différends, dont l’origine pourrait être cherchée parmi nos voisins d’outre-Manche, Bonvalot en remit le commandement à M. de Bonchamps.

Celui-ci avait pour premier objectif de recruter en passant une armée abyssine, dont la présence à Fachoda aurait eu, un peu plus tard, une influence décisive.

Mais juste à ce moment, des révoltes, fomentées comme toujours par l’or anglais, éclatèrent dans l’empire d’Abyssinie.

Des ras, ou gouverneurs de provinces, prirent les armes contre le négus Ménélick, et ce dernier, obligé de rassembler des troupes pour châtier les rebelles, fut dans l’impossibilité absolue d’apporter un concours efficace à la mission de Bonchamps.

Force fut au commandant de l’expédition Djibouti-Nil de se passer de lui.

Bonchamps et sa troupe traversèrent les États du Négus, gagnèrent la Sobat, au prix de terribles fatigues, au milieu