y a, sur le Nil, une mission de blancs beaucoup plus forte que la nôtre.
— Sur le Nil ?
— Oui, et, d’après ce que j’ai cru comprendre, ces blancs auraient le même objectif que nous.
— Fachoda ?
Les assistants avaient pâli.
Quoi ! au moment où ils étaient assurés de la victoire, d’autres viendraient occuper les rives du Haut-Nil, rendant inutiles tant de fatigues, tant de dévouement.
Cela n’était pas, ne pouvait pas être.
Et soudain le commandant se toucha le front.
— Je conçois, ce doit être la mission Liotard qui, partie de Rafaï et remontant vers Dem-Ziber, a passé par le premier itinéraire que j’avais choisi.
Tous respirèrent :
— Ce sont des Français ! Ce sont des Français ! chuchotait-on autour de la table.
Mais le sergent tourna négativement la tête.
— Non, non, ce n’est pas cela.
— Comment le savez-vous ?
— Toujours par mes prisonniers.
— Quoi !… Ils connaissent la mission Liotard.
— Oui, mon commandant. Elle a, paraît-il, occupé Dem-Ziber, mais elle n’a pu s’avancer au delà.
— Pourquoi donc ?
— Parce que les cours d’eau sont à sec. Là-bas, il y a moins d’humidité qu’ici, et, pour gagner le Bahr-el-Arab, qui leur permettrait de venir déboucher dans la rivière des Gazelles, il leur faudrait frayer, par terre, une route de quatre cents kilomètres. La mission n’est pas assez nombreuse pour se livrer à ce tour de force.
Marchand écoutait pensif.
Les nouvelles qu’apportait le sous-officier étaient évidemment vraies.
Tout concourait à le démontrer.
De l’exactitude des choses connues déroulait celle des inconnues.
Liotard ne disposait pas de forces suffisantes pour occuper militairement, et Dem-Ziber, et le pays dont cette bourgade était le centre.