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flamboyantes sur les toitures de paille, sur les nattes, sur tous les objets inflammables.

Une à une les cases s’embrasaient.

Et le feu s’étendait partout, pointant ses dents rouges et bleues vers le ciel.

À l’extrémité de la voie principale que suivaient les officiers, un large espace libre avait été réservé.

Au centre, séparé de toute autre habitation par une distance de vingt à trente mètres, se dressait une construction plus élevée, plus vaste, sinon plus luxueuse que les autres.

— La case du chef sans doute, murmura le médecin.

Mais Mangin secoua la tête.

De la main il désigna deux piliers entaillés qui se dressaient de chaque côté de l’entrée.

Au sommet, un artiste inhabile avait figuré un masque grimaçant, horrible.

— C’est un temple. Un temple du dieu Terpi, le dieu de la destruction.

Et, comme se parlant à lui-même :

— J’avais déjà vu cela dans le Baghirmi, mais je ne croyais pas que le culte de cette divinité sanguinaire s’étendait aussi loin à l’Est.

Après une pause, il reprit :

— Figurez-vous que ce Dieu, dont la figure, creusée dans un bloc de bois, a une vague ressemblance avec un crabe, exige non seulement des moutons, bœufs et chèvres que l’on égorge sur ses autels, mais encore des victimes humaines. Chaque mois, deux ou trois personnes, parmi les plus jeunes et les plus belles, sont immolées en son honneur, et pendant la fête Akimé, laquelle dure une semaine, vingt ou trente créatures reçoivent la mort chaque jour.

Pour répondre aux besoins de cette orgie de sang, les sectateurs de Terpi se livrent, aux approches de la semaine rouge, à une véritable chasse à l’homme.

Ils se répandent dans les plaines, dans la brousse, fondent sur les voyageurs isolés, sur les femmes, les jeunes filles, les enfants qui s’écartent des villages, qui descendent aux fleuves pour y puiser de l’eau.

Ils les garrottent, les entraînent jusque dans leur réduit.