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la dette sacrée que l’on acquitte, sous peine de déshonneur et de forfaiture.

Et d’un ton si tendre, si doux, que Stella ferma les yeux, une buée rose montant de ses joues :

— Quand je vous emportais au galop de mon cheval, je me réjouissais en songeant que si vous périssiez, je périrais avec vous. Au lieu de mourir avec vous, j’affronterai la mort pour vous. Avec ou pour, y a-t-il une bien grande différence, et l’ennemi à combattre sera-t-il plus redoutable que le volcan déchaîné ?

— Accompagnez-moi, murmura la jeune fille d’une voix incertaine. Je parlerai là-bas, avec l’espoir que les chers disparus m’entendront, que leurs esprits envolés flotteront autour de nous.

Au milieu du désastre, dans ce désert de cendres, les paroles sonnaient étrangement.

Une émotion générale, supérieure à tous les sentiments intimes, élevait les interlocuteurs au-dessus d’eux-mêmes.

Tous deux se mirent en route, suivant le palier formé par l’ancien plateau du morne Rouge.

Jean allait le premier.

Il avançait avec précaution, sondant le terrain. Sous la cendre, en effet, pouvaient se dissimuler des jets de lave, non refroidis encore. Un pas sur ces coulées de roches en ignition eût été mortel.

Grâce à ses précautions, sa compagne, lui-même arrivèrent sains et saufs auprès de l’atelier qui lui avait paru intact.

Il s’était trompé.

Sous la poussée irrésistible des vapeurs et des matières projetées par le volcan, les montants de bois fichés en terre, qui formaient la carcasse et le soutien du bâtiment, avaient été brisés au ras du sol et l’atelier tout entier, son plancher, son contenu, avaient été refoulés en dehors du courant destructeur.