dépendait que de moi, jamais plus je ne troublerais votre quiétude ; par malheur…
— Par malheur ?… questionna Pedro, étreint par une lancinante anxiété.
— Je n’ai pas le droit de garder le silence.
— Il semble pourtant que l’affaire est close. Les juges ont prononcé.
— À tort señor. Ils ont condamné une innocente.
Pedro s’agita désespérément sur son fauteuil.
— Pensez-vous que je vais en appeler… contre mon frère Olivio ?
— Non.
— Alors qu’espérez-vous ?
Jean prit un temps, puis avec une lenteur calculée, chaque mot frappant comme une flèche la pensée de son interlocuteur :
— J’espère que l’honnête homme qui est en vous m’écoutera. J’espère qu’avant toute chose il a soif de vérité, de justice ; qu’ayant à choisir entre un coupable, de sa race, de son sang, et des inconnus innocents, il fera taire son cœur, il imposera silence à ses nerfs, il respectera la loi, même si elle le déchire dans ses plus chères affections.
Une pâleur de cire avait couvert le visage du gouverneur ; mais ses yeux brillaient, couvrant l’ingénieur d’un regard loyal.
— Vous avez raison de penser ainsi. Déjà à l’hacienda de Amacenas, j’ai prouvé…
— Je le reconnais, señor ; sans la faiblesse excusable de la pauvre Stella, la preuve du crime serait faite aujourd’hui.
Pedro passa la main sur son front brûlant :
— La preuve du crime. Quelle est cette preuve que vous promettez toujours sans la fournir ?
— Cette preuve, hélas ! je ne puis la donner que si vous m’accordez votre secours.
— Il vous est acquis.
— Eh bien ! vous la connaîtrez le jour où vous, moi, Stella et de fidèles compagnons, nous nous éloignerons à toute bride de Sao-Domenco, après avoir avisé Olivio du but de notre voyage.
— Ce but, quel est-il ?