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les cerisiers, les pruniers, les pêchers. Et parfois l’ananas, à la chevelure feuillue, semblait se balancer sur la même branche que les poires succulentes, ou les pommes ventrues. C’était un mélange à troubler le plus blasé des botanistes, à rendre fou un peintre et muet un poète.

Mais les courtiers en diamants devaient être accoutumés à cet étonnant spectacle. Tout en s’appuyant sur le bras d’Olivio, sur celui de Massiliague, Alcidus Noguer parlait :

— Je ne veux pas vous tromper. Je crois que la maison Muller et Muller accapare le diamant pour faire le cours en Europe. C’est une appréciation personnelle, car on ne m’a rien dit de semblable.

Il s’arrêta :

— Permettez-moi de faire halte un moment. Ma maudite jambe !…

Olivio répondit gracieusement :

— Je suis à vos ordres, señor Alcidus.

Puis, profitant de l’arrêt :

— On ne vous a jamais vu dans nos contrées.

— Jamais. Cela n’a rien d’étonnant d’ailleurs.

— Ah ! vraiment ?

— Ma foi non. Scipion et moi nous occupions naguère des gîtes diamantifères du Cap et de l’Inde. Et avec son gros rire allemand, Alcidus continua :

— C’est vous dire que l’on s’y connaît. Depuis dix ans, nous avons tenu en mains les plus beaux échantillons des mines, et il y en a de beaux, là-bas, d’une eau irréprochable ; tandis que vos pierres brésiliennes sont souvent teintées de jaune…

Il s’interrompit vivement pour ajouter avec un salut poli :

— Soit dit sans vous offenser.

Puis, brusquement :

— Mais nous parlerons diamants après-demain, à l’heure fixée par vous-même. Je ne veux pas être un de ces importuns, qui entretiennent constamment autrui de leur profession. Plus de diamants et vive la joie ! Comment passe-t-on le temps à l’hacienda de… de…

Il parut chercher. De guerre lasse, il murmura :