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en sursaut par le gémissement de l’alligator, le sifflement du boa et les jacassements terrifiés des oiseaux.

Puis venait la découverte de Francis sous son déguisement noir, les longues journées passées à Manaos ; la fuite dans la huit, la navigation incertaine sur le Gapo, l’arrivée à Teffé, où il avait fallu séjourner plus d’un mois avant de pouvoir reprendre le voyage.

Tout à son rêve, il oubliait l’heure présente.

Soudain, il sursauta.

Il lui avait semblé entendre un cri, cri d’angoisse, d’appel. Mais il eut beau prêter l’oreille, le bruit ne se renouvela pas.

— Je me suis trompé, murmura-t-il.

Du reste, son attention fut aussitôt sollicitée par un son, réel cette fois.

Des pas frappaient sur le sol.

Évidemment ceux qui s’avançaient croyaient n’avoir rien à redouter, car ils ne prenaient aucune précaution pour assourdir la résonance de leur marche.

— Eux, fit encore l’ingénieur. Oh ! je les déciderai à renoncer à leur odieuse existence !

Et tapi à l’angle de la cabane, il chercha à percer l’obscurité environnante.

Bientôt il distingua deux ombres qui se rapprochaient rapidement. Il put saisir leur conversation.

— Lé pauvre diable sé moque des bateliers, disait l’un des personnages, d’un ton moitié ironique, moitié pitoyable.

— Candi ! murmura Jean.

— Yes, il naviguait sans bateau, dear fellow, et je trouvais cela impropre.

— Perche, mio caro ?

— Par la raison que ce gentleman il faisait la nique aux marins de le Angleterre, lesquels pouvaient pas aller sur l’eau sans steam-boat.

Jean frissonna.

L’inconscience des criminels se trahissait à chaque parole prononcée. Ils n’éprouvaient ni regrets ni remords. À ces ignorants du bien et du mal, le crime