— Est-ce vraiment d’une bonne nouvelle, je cite vos paroles de tout à l’heure, qu’il s’agit ?
— Oui, Sire.
— Eh bien, confiez-la-moi. Les gens de votre nation sont entêtés ; j’aurais beau vouloir vous imposer silence, je n’y réussirais pas. Parlez, colonel.
L’ironie du ton fut perdue pour Campbell, comme la sévérité précédente.
— Sire, un navire est arrivé dans le port de Porto-Ferrajo. Il a été admis à la libre pratique.
— Cela m’est indifférent.
— Par bonheur, tout m’intéresse, Sire. J’ai donc désiré savoir pourquoi ce bâtiment était traité autrement que les autres.
— Curiosité !
— Dont vous me louerez, Sire, quand je vous aurai dit que l’exception en cause a été consentie, à raison de la présence à bord d’illustres passagers.
L’Empereur tressaillit. La matité de son teint s’accentua, il y eut une hésitation dans sa voix lorsqu’il grommela :
— Encore des visites. Les augustes passagers désirent voir comment Napoléon supporte la mauvaise fortune.
La bouche du colonel s’ouvrit pour un rire silencieux.
— Ce n’est point cela.
— Quoi donc alors ?
— Les illustres hôtes que j’annonce viennent sans doute embellir la retraite de Votre Majesté.
— Embellir ma retraite… ?
Les traits de l’Empereur s’étaient contractés.
L’altération de son accent, de son visage, décelaient une puissante émotion intérieure.
L’Anglais affirma d’un signe de tête.
— Quels sont-ils ? interrogea Napoléon avec effort.