— Je suis flatté de la bonne opinion qu’il a de nous. Je m’efforcerai de ne l’en pas faire changer.
— Mais, continua le Japonais, dès l’instant ou vous êtes résolus à résister, il faut que vos navires soient détruits, afin que la mer soit déblayée en arrière des forces qui opèrent devant Port-Arthur.
— Vous tenez le goulet, vous tenez la rade… Je ne puis donc sortir. Le problème est résolu.
— Vous oubliez, monsieur, que cette solution immobilise quinze vaisseaux de mon maître le Mikado.
— Je n’oublie rien… Au contraire… je suis fier de l’honneur d’une garde aussi imposante.
Dans les yeux brisés de l’officier japonais passa comme une flamme ; mais cet indice de colère s’éteignit aussitôt.
Et, continuant sur le ton du persiflage :
— Je comprends votre fierté. Par malheur, ainsi que je vous l’indiquais tout à l’heure, nos navires sont commandés pour d’autres services.
— Je regretterai leur départ.
— Point, car vous aurez péri avant.
Et, rudement :
— L’amiral Uriu veut que vous quittiez le port aujourd’hui même.
— Vous permettrez, riposta son interlocuteur, que j’attende les ordres de mon amiral, Alexeieff est son nom et point Uriu.
— Vous n’attendrez pas.
— Parce que ?…
— Parce que, si vous refusez de marcher à notre rencontre, nous bombarderons Chemulpo.
À cette menace, les Russes pâlirent.
— Mais le droit des gens…
— Il n’y a pas de droit des gens, messieurs. Il n’y a que la victoire ; pour l’atteindre, tous les moyens sont bons.
Et avec une ironie cruelle, Kuroki acheva :
— Les Français, nos premiers instructeurs, nous avaient farci la tête de considérations sentimentales. Par bonheur, ce sont des officiers allemands qui ont achevé la formation de notre armée. Grâce à eux nous avons appris que la déclaration officielle de la guerre, le droit des gens étaient des traditions surannées. Il faut vaincre par la surprime, par la ter-