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La petite Anglaise levait les bras au ciel, prête à se livrer aux multiples imprécations dont les héros de l’Iliade détiennent le record, et dont les dames mécontentes ont conservé le secret.

Le sacrificateur ne lui en laissa pas le temps. Froidement, il reprit :

— Lady, je n’ai pas à discuter. J’obéis à la consigne qui vient de m’être donnée, et je vous la transmets aussi respectueusement que possible.

Puis accentuant bien ses paroles :

— Vous êtes gardées à vue. Vous allez vous habiller, rassembler vos bagages. Sous mon escorte, vous irez là où le gouvernement a décidé que vous iriez.

— Et si je refuse ? clama Mrs. Doodee très en colère.

— En ce cas, lady, la prison vous servira de demeure.

— La prison ? Stupéfaite, rageuse, Eléna redit ces trois syllabes sur un ton impossible à rendre. On y sentait toutes les révoltes, tout le courroux d’une citoyenne anglaise maltraitée.

— En prison, répéta flegmatiquement le sacrificateur, très correct dans son rôle d’officier des douanes.

Et conciliant :

— Le mieux est de vous soumettre, lady. Vous en serez quitte pour un déplacement que je m’efforcerai de rendre agréable.

— Mais ne puis-je parler au gouverneur ?

— Non.

— À l’un de ses subordonnés ?

— Pas davantage.

Avec une inclination courtoise, Oraï conclut :

— Ne songez pas à résister, lady. Hâtez-vous même d’obéir, car il vous en cuirait si, à six heures sonnant, nous n’avions pas quitté cet hôtel et Batavia.

Sur ce, le pseudo-officier salua jusqu’à terre, aussi paisiblement que s’il terminait une visite de cérémonie, puis il gagna la porte et disparut.

Les deux femmes se regardèrent :

— Encore des fous ! grommela plaintivement Mable ! Des fous, comme en Amérique.