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canadienne. Fleuriane s’était étonnée de rester en arrière de tous les concurrents, mais Frachay avait répondu tranquillement :

— On quittera Le Havre dans trois jours. Rien ne nous oblige à arriver dans cette ville avant ce soir, et j’étudie ma mécanique.

Ce qui avait fait hausser les épaules au petit Jean Brot, mais avait recueilli le suffrage de la toujours prudente Mme Patorne. Fleuriane, au surplus, n’avait pas insisté le moins du monde.

La veille, comme convenu, elle s’était rendue à la gare de Lyon, avait reçu à l’arrivée du train de Mâcon le mécanicien Frachay qu’elle avait tenu à conduire jusqu’au garage de l’automobile.

Or, en route, elle s’en souvenait, Frachay avait consenti, durant quelques minutes, à redevenir Dick Fann pour lui dire :

— À dater de ce moment, mademoiselle, nous engageons la partie. Comme l’enjeu peut être notre existence même, la prudence absolue s’impose. Veuillez me laisser agir sans me demander jamais une explication. Soyez assurée que, toutes les fois que je croirai pouvoir vous renseigner sans risquer d’avertir nos ennemis, je m’empresserai de le faire, sans attendre vos questions.

Et, maintenant, elle se reprochait d’avoir manqué si tôt à la réserve recommandée par son défenseur.

Dick agissait comme il le jugeait convenable. Sans doute, il avait un but, une raison… La jeune fille était certaine que toute manœuvre du mécanicien improvisé tendait à son bonheur, à celui de son père, à leur salut. Alors pourquoi se montrer nerveuse, pourquoi risquer de prononcer la parole imprudente qui renforcerait peut-être l’ennemi ?

L’ennemi ! Où était-il à cette heure ? Bien loin, en avant sans doute. La Botera, emportant Larmette et ses compagnons, une fois hors de Paris, avait attaqué la route à toute vitesse. Cette formidable machine de cent chevaux avait disparu ainsi qu’un météore, au milieu des meuglements assourdissants d’une trompe puissante.

Et Fleuriane se confiait que la tactique de son mécanicien devant être de contrecarrer celle de Larmette, la lenteur de marche de la de Dion provenait peut-être tout simplement de la course effrénée de la Botera.