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ticité nombreuse, dont la présence dans les immeubles rassure les propriétaires contre les attaques des cambrioleurs. Partant, pas de gardes de nuit. D’autre part, sur un espace d’environ six cents mètres, la perspective n’est bordée d’hôtels que d’un seul côté. En face s’étendent les jardins d’Alexandreïeff, noyés d’ombre. Voilà un refuge admirable pour un criminel. Là, derrière les grilles clôturant le parc, on peut attendre le passage du fonctionnaire condamné par le comité K. 57, sans que personne soupçonne la présence du fanatique. Aisément, on peut jeter la bombe dans la rue par l’écartement des barreaux de la grille. Certes, si j’étais nihiliste, voilà l’endroit que je choisirais sans hésiter.

Sur la place du Théâtre, Dick passa le plus loin possible du péristyle brillamment éclairé. Des équipages amenaient quelques spectateurs en retard.

Des moujicks, pauvrement vêtus, se précipitaient, ouvraient les portières, quémandant quelques kopecks des invités à la soirée de gala.

Ils n’obtenaient, en général, que des rebuffades.

À présent, Dick Fann s’enfonçait dans les rues avoisinant le port.

Il gagna le quai du Commerce et se glissa adroitement sous des caisses amoncelées en vue de leur chargement à bord d’un grand steamer amarré le long du pier.

La pluie, qui tout le jour avait inondé la terre, ne tombait plus.

Mais une bise glaciale s’était levée, et le jeune homme se déclara qu’il lui paraissait bon d’avoir un abri. Abri insuffisant, par les fissures duquel le vent froid se glissait sournoisement, mais enfin abri, par comparaison avec le plein air.

Heureusement, le mauvais temps avait fait le désert sur le port. Dick, complètement gelé au bout d’une heure de faction, put se promener pour rappeler un peu de chaleur à ses membres. Un homme, de garde à bord du steamer remarqué à son arrivée, l’aperçut et l’interpella.

Ma foi, l’Anglais entra en conversation.

Il se donna pour le représentant, le gérant d’un négociant d’Irkoutsk, venu à Vladivostok à la suite du grand-duc, qu’il devait voir à la sortie du théâtre. Histoire de tuer le temps, il était venu jusqu’au port, avec l’espoir de découvrir un sien ami, employé chez