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— Il faudra recommencer dans cinq heures, dit-il. Ce soir, je rapporterai une solution plus concentrée.

— Plus concentrée ?

Il hocha lentement la tête, ses traits empreints de bonté prirent un caractère d’autorité persuasive.

— Ne pouvant soigner, il faut… abrutir… Abrutir est la suprême charité. Faute de cela, ses souffrances seraient intolérables.

— Mais, s’exclama Dick Fann, le mal n’est-il pas de nature cancéreuse ?

— Non.

La réponse fut précise. M. Dody était sûr de son fait.

Et alors commença une veillée d’agonie.

Mme  Patorne reprenait-elle conscience de vivre, vite on lui administrait une piqûre et elle retombait dans une sorte de torpeur, un engourdissement qui n’était point le sommeil, et qui cependant n’était point la veille, au moins consciente.

Du fond de son esprit obscurci par la morphine, des idées imprécises montaient, telles des bulles à la surface d’un étang.

Elles éclataient en phrases singulières, n’appelant pas de réponse. On eût cru que le mécanisme de la parole fonctionnait au hasard, comme une machine mise en mouvement en l’absence de son conducteur.

Avec une inlassable patience, M. Dody revenait plusieurs fois par jour, demeurant auprès de la moribonde, cherchant à surprendre le secret du mal qui la torturait.

Mme  Patorne s’affaiblissait rapidement, voilà ce qui apparaissait évident pour tous.

Puis les rougeurs signalées par le praticien dans la région du diaphragme s’étaient accentuées. Roses d’abord, elles avaient viré au violet.

Et à chacune de ses visites, M. Dody répétait avec une sourde colère :

— Qu’est-ce que c’est que cela ? Ces rougeurs indiquent un caractère nettement inflammatoire, et cependant elles se différencient de toutes les maladies éruptives connues.

« Qu’est-ce que c’est que cela ?

Mais répondre à une question est presque toujours plus malaisé qu’interroger.