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Ils comprennent qu’il va prendre l’élan qui le ramènera vers eux.

Et de fait, évitant un plantigrade adulte qui le serre de près, il se rapproche comme une flèche.

Des cris étranglés déchirent la gorge des spectateurs.

Une pierre a dû se rencontrer sur le chemin du courageux gamin ; il a chancelé, il est tombé, et un ours énorme, les yeux rouges, la gueule formidablement ouverte, se jette sur lui.

Il y a une seconde d’inexprimable horreur, d’épouvante suraiguë. Et puis une clameur stupéfaite.

Le petit s’est relevé, ayant arrêté net son adversaire d’un coup de pied terrible sur le museau, et de nouveau, il détale en tête des ours, dont la poursuite semble mollir. Peut-être les bêtes féroces s’inquiètent-elles de la voltige de cet adolescent qui tombe, se redresse, restant toujours hors de portée de leurs griffes.

Enfin, piffuitt ! À une vitesse vertigineuse, Jean revient vers la caverne, il bondit par la brèche, clamant :

— Feu ! Feu partout !

Les revolvers claquent, crachent à la face des assaillants leurs balles qui, de près, trouent cruellement les chairs des carnassiers.

Ceux-ci, sous cette pluie de projectiles, font volte-face, regagnent l’endroit où leur expérience leur a appris qu’ils sont hors d’atteinte. Et Jean, qui s’est débarrassé des skis, ordonne, un peu essoufflé, mais riant de bon cœur :

— Aveuglons la brèche ; après, on se reposera. La farce est jouée.

Tout le monde se met à l’ouvrage. Les pierres sont remises en place, solidement encastrées les unes dans les autres.

Comme Fleuriane regarde Jean Brot, ses yeux exprimant le sens des paroles qu’elle va prononcer, le gamin la prévient.

— Ne parlez pas, la demoiselle. Je me suis dit : « Si les ours m’attrapent, pendant qu’ils me croqueront, le « patron » prendra de l’avance… » Je sais bien, vous m’auriez regretté parce que vous êtes tout plein gentille ; mais lui, cela vous aurait fait beaucoup plus de peine… Alors, ça a réussi, n’est-ce pas ? n’en parlons plus. Je ne voulais pas que vous pleuriez, c’était mon droit, je pense, et personne n’a rien à voir là dedans.