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lège. C’est à l’autre extrémité de la ville. Tant pis, il faut y aller, Jean, il le faut.

Le collège, le voici. Un grand bâtiment noir, qui a un air de prison. Est-ce que c’est bien nécessaire de bâtir des immeubles si rébarbatifs pour instruire les gens ?

La porte est entr’ouverte, j’entre. À droite, sur une baie vitrée, je lis « gardien ». Gardien, ce que nous appelons : concierge, à Paris.

Ce personnage est assis en face d’un bon feu… Il lit une gazette, et se dérange à peine pour grommeler :

— Qu’est-ce que vous demandez ?

— Le professeur de chimie.

Il se retourne brusquement, avec un visible étonnement.

— Quel professeur de chimie ? Il y en a deux dans cet établissement, le plus important de Colombus.

Je crois bien, c’est le seul collège.

Mais je n’exprime pas cette réflexion mentale. Inutile de mécontenter le bonhomme. Au surplus, une idée habile vient d’éclore dans ma tête.

— N’importe lequel, réponds-je crânement. Je viens de la part de M. le juge d’instruction Thomson, pour un renseignement de la plus haute importance.

À quoi bon se gêner ? Puisque je procède à l’instruction, j’agis pour le compte du juge, n’est-ce pas ? Indirectement, c’est vrai. Sans l’en prévenir, c’est encore vrai ; mais si je trouve, n’est-ce pas lui qui aura tout le bénéfice de l’aventure ?

Le « gardien », lui, s’est levé. Envoyé par le juge d’instruction, je prends à ses yeux une importance indéniable.

— Il n’y a, en ce moment que M. Flag au « cabinet de physique » ; montez l’escalier C au fond de la cour d’honneur. C’est au premier, la porte à droite… Vous verrez l’inscription : cabinet de physique et laboratoire.

— Merci bien, m’sieu.

Mais il me retient encore pour me dire, avec cette déférence protectrice des gens de sa profession :

— Et M. le juge Thomson se porte bien ?

— Aussi bien que possible par ce temps de chien.

— Oh ! ce temps de chien, voilà bien le mot propre.

— Au revoir, m’sieu.

Je m’élance à travers la cour d’honneur. Je n’ai