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— Ceci m’apparaît sage, car, dans votre situation, il convient de se défier de tout et de tous.

La réflexion amena un imperceptible sourire sur les lèvres de Sika. La situation, cette brave petite Emmie croyait la connaître. Qu’eût-elle dit si elle avait soupçonné que ce n’était pas un simple individu qui poursuivait le général Uko, mais bien un peuple tout entier.

Pourtant, Sika conclut sérieusement :

— Cherchons Véronique ; car je suis de votre avis. Bien d’obscur ne doit exister autour de nous.

Elles descendirent au pont des secondes. La camériste ne se trouvait pas dans sa cabine. Elles remontèrent ; mais ce ne fut qu’après une demi-heure de recherches, qu’elles découvrirent la fille de chambre, tout à l’avant du steamer, accoudée juste au-dessus de l’étrave et absorbée en apparence par la contemplation de l’horizon, sans cesse reculé par la marche du navire.

Sans doute, Pierre-Véronique avait mis à profit le temps écoulé, car il ne manifesta aucune surprise en voyant les jeunes filles réunies.

Et Sika lui disant à brûle-pourpoint, avec la pensée de le troubler par la brusquerie de l’attaque :

— Véronique, vous ne m’avez pas appris que vous aviez rencontré à bord un ami…

Il répliqua sans hésitation :

— Je me proposais de le confier à Mademoiselle en la revoyant.

Puis, avec une nuance de respect fort bien joué d’ailleurs, il poursuivit :

— Seulement, ce n’est pas un ami. L’héritier d’un grand nom et d’une immense fortune ne saurait être l’ami d’une humble fille de chambre.

— Qu’est-ce donc alors ?

— Mon frère de lait, mademoiselle, qui veut bien se souvenir que ma mère nous fut nourricière à tous deux, et qui consent à me marquer une bienveillance dont je lui suis profondément reconnaissante.

La pseudo-Véronique acheva d’un ton pudique :

— Mademoiselle pense bien que je n’aurais eu aucune raison de lui cacher cela. Bien plus, même si le