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Emmie, jouant savamment des coudes, s’était faufilée au premier rang du groupe qui entourait les causeurs.

Profitant de ce que l’attention générale se concentrait sur un personnage qui plaisantait agréablement de l’aventure, elle passa sa main sous le bras de Sika, s’efforçant vainement d’apaiser son père, et entraînant à l’écart la jolie Japonaise, dont le visage exprimait à la fois l’anxiété et une gaieté contenue, elle murmura, assez bas pour qu’aucune oreille indiscrète ne pût intercepter sa confidence :

— C’est la suite du cambriolage du train.

— La suite. Que prétendez-vous dire ? s’exclama son interlocutrice.

— Chut ! Plus bas, je vous en prie.

— On croirait que vous supposez le voleur près de nous ?

— C’est presque cela. Je connais le larron, rat du train de luxe et rat d’hôtel.

— Vous le connaissez, dites-vous ? balbutia son interlocutrice, stupéfaite.

— Je l’ai vu cette nuit et aussi ce matin. Cette nuit, comme il sortait du compartiment du général ; ce matin, ici même.

— Ici, dans cet hôtel ?

— Où il est encore. Il occupe la chambre 15… C’est là qu’il faut chercher les objets volés et faire arrêter le voleur.

À cette proposition, si normale cependant, Sika frissonna, Emmie sentit son bras potelé trembler sous sa main.

— Quoi ? Vous n’approuveriez pas l’arrestation ?

D’une voix assourdie, la jeune fille chuchota :

— Elle est impossible, chère petite amie.

— Impossible… Je vous affirme qu’il a la chambre 15.

— Je vous crois, seulement…

Sika cherchait ses mots ; on sentait qu’elle forgeait un mensonge.

— Seulement pour le pari, il vaut mieux nous taire, avoir l’air d’ignorer le coupable ; car un adversaire démasqué, démasqué par vous, chère mignonne,