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« Couloir » ne donne pas l’idée des dimensions de l’endroit.

Large de six mètres, se développant suivant un rectangle régulier sur une longueur de deux cents mètres de côté, il dessert toutes les chambres et appartements du second.

À chacun des angles, une sorte de bureau-logette est installé. Un employé y séjourne tout le jour, remplacé pour la nuit par un collègue. Ainsi une surveillance incessante est assurée. Les rats et souris d’hôtel, si adroits cambrioleurs soient-ils, seraient mal venus à exercer leurs talents au Mirific, d’autant plus que les divers étages et le rez-de-chaussée sont reliés par des téléphones, des sonneries électriques, en un mot par une foule d’inventions beaucoup plus rapides que le plus agile des voleurs.

Le visiteur, un grand garçon complètement rasé, vêtu avec cette élégance trop recherchée qui trahit le parvenu, regarda autour de lui.

Une silhouette féminine se découpait sous la clarté des ampoules électriques, dans le bureau-logette situé à la gauche du nouveau venu.

Il eut un sourire contraint, haussa nerveusement les épaules, puis marcha vers la personne remarquée.

À mesure qu’il se rapprochait, la physionomie de celle-ci se précisait.

C’était une jeune fille, aux cheveux châtains, grande et mince, autant que l’on en pouvait juger dans sa station assise. Le visage apparaissait charmant, rosé, éclairé par des yeux bleus, naïfs et inquiets. Un imperceptible pli, au coin des lèvres, décelait la mélancolie de ceux qui se sont heurtés aux rudes angles de la vie.

Au bruit des pas, étouffé cependant par l’épaisseur du tapis, elle avait levé la tête et regardait venir le visiteur.

Ce dernier s’accouda sur le bureau, bien en face d’elle. Il s’assura d’un regard circulaire que personne n’était à portée de l’entendre, et la voix abaissée par un surcroît de prudence :

— Eh bien, Pierre, tu ne me reconnais pas ?

L’interpellée sursauta. Mais, chose étrange, au lieu