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— Vous vous méprenez. Je n’hésite pas. Je refuse net.

Et, passant à une ironie tranchante, des éclairs dans ses prunelles, il continua :

— Votre père ne songerait qu’à contrarier ce que je veux, ce qui sera.

— Contrarier ? redit-elle, comme étonnée par ces syllabes.

Il fut brutalement sincère :

— Sans doute. Il voudra certainement vous emmener loin de Bassorah.

— N’est-ce point naturel ?

— Je n’en disconviens pas. Seulement, il y a un seulement… dont vous ne tenez pas compte.

— Si je le connaissais, peut-être…

La voix de la captive se faussa. Elle avait conscience de provoquer les paroles définitives, irréparables. 

Il répondit avec une joie sauvage :

— Je suis ici uniquement pour vous instruire. Je ne veux pas que vous partiez. Je ne permettrai jamais que vous alliez vivre loin de moi.

Dans l’organe du Persan vibrait une tendresse barbare.

Pour Sika, la vérité n’était plus douteuse.

À cette minute effroyable, sa pensée se dérobait. Son esprit s’obscurcissait d’un brouillard. Son trouble ne lui permettait plus de raisonner, au moment où elle avait le plus besoin de raisonnement. Il est vrai que, eût-elle conservé la plénitude de son sang-froid, elle n’eût point découvert un moyen de salut.

Il reprenait, les dents serrées, la colère chassant le masque de correction que les Asiates adoptent à l’étranger, qu’ils méprisent, qu’ils considèrent comme une simple manifestation de politesse à l’égard des races inférieures d’Europe.

— Je lis sur vos traits que votre orgueil se révolte. Dans votre pays, on se juge supérieur au reste du monde. Qu’importe que vous éprouviez pour moi de la répulsion, de la haine. Vous êtes en mon pouvoir ; rien ne saurait modifier ma résolution. Ressentez de la joie ou de la tristesse, accueillez mes projets par le rire ou par les larmes, vous serez mon épouse.

Elle tenta de jeter le trouble dans son esprit, igno-