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— Vous parlez comme si vous aviez l’expérience de ces choses, Véronique ; et je suis contente que vous partagiez mon opinion.

D’un geste machinal d’apparence, elle arrangeait les plis de sa robe, sous laquelle elle sentait, la gênant fort, le vêtement que ses compagnons jugeaient bien plus éloigné d’eux.

— Eh ! reprit le général, si je ne me berçais d’un espoir identique, je vous affirme que je ne serais plus vivant.

— Que dis-tu, père ? balbutia sa fille, frissonnant à cette déclaration.

— Je dis que quiconque échoue dans une mission confiée par son prince doit, sans attendre l’ordre de se punir, sortir de la vie dont il est devenu indigne.

Mais, refusant de s’étendre sur ce sujet, il regarda Sika bien en face, et la voix assourdie :

— Sur quoi bases-tu ton opinion, toi, mon enfant ?

Elle rougit légèrement en répondant :

— Sur ce que Mlle Emmie avait promis, qu’une fois à Port-Saïd, elle mettrait l’agent à même d’examiner le pantalon en cause. Or, pour tenir sa promesse, il est indispensable qu’elle soit en sa présence. En s’éloignant avec le vêtement, elle est dans l’impossibilité de réaliser son engagement ; et cependant notre ennemi ne saurait l’accuser d’y avoir manqué.

Elle eût pu ajouter qu’elle ne regrettait pas d’avoir aidé la fillette dans sa supercherie. Seulement, elle ne jugea pas opportun de faire cette confidence à ses compagnons, auxquels la réserve d’une jeune fille bien élevée l’eût contrainte de cacher les motifs de son acte. Et puis, pourquoi abattre son jeu sur table, alors que l’on n’y est pas forcé ! Elle détourna la conversation, en se forçant à un rire qui sonna faux :

— Notre confiance, en tout cas, nous entraîne à un détour imprévu, à la suite de ma jeune amie.

— Un détour, hélas ! soupira le Japonais. L’incident nous conduit à remonter vers le Nord.

À Port-Saïd, cher père,