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Et doucement, déposant auprès d’elle un paquet enveloppé, d’une toile, elle continua :

— Ceci, c’est mon uniforme de fille. Je l’emporte pour revenir à bord. Si quelqu’un se réveille en notre absence, inutile que l’on me voie en mousse, ce qui appellerait les soupçons. Donc, je récapitule votre rôle. Une fois dans le port, nous sautons à terre. Vous ne vous occupez pas de moi. Je me charge de ne pas vous perdre de vue, soyez tranquille.

La Japonaise l’interrompit :

— Je sais. Je vous ai écoutée avec tant d’attention. Je louerai, en déposant des arrhes, une voiturette automobile ; je désire conduire moi-même, désir naturel. Je prends des lunettes de tourisme, qui me rendent méconnaissable, et ainsi équipée…

— Ce sera votre tour de me suivre à distance. Je me serai renseignée de mon côté. Ainsi j’irai droit à la tente des Messageries Maritimes, où nous rirons…

— Rire ! Vous me faites trembler. C’est à partir de là que j’ai peur…

Du coup, Emmie enlaça Sika ; avec une inflexion tendre, elle susurra :

— Ma jolie cousine, ou presque, faites ce que je vous ai dit et ne vous inquiétez de rien. Tout marchera comme sur des roulettes.

Gentiment ironique, elle conclut :

— Marcel sera empêché de rendre à votre père le couvre-tibias qui vous séparerait à jamais. L’idée doit vous rendre le courage.

Elles se sourirent, échangèrent un baiser non exempt d’émotion ; après quoi, Emmie, se dégageant de l’affectueuse étreinte, reprit, exécutant le geste à mesure qu’elle l’indiquait :

— Je me place au moteur. C’est plus rationnel pour entrer dans le port, n’est-ce pas ?

Une heure puis tard, le canot n° 2 accostait au pier 21, sans que le général, Tibérade, Midoulet, les matelots, eussent conscience de cet heureux achèvement du voyage.