Marcel ouvrait la bouche pour affirmer l’absence de l’agent, mais plus prompte que lui-même, sa petite cousine Emmie ne lui en laissa pas le temps. D’un geste net, elle le désigna à l’employé, et avec une conviction qui médusa l’intéressé, elle prononça :
— C’est monsieur.
Avant que Tibérade eût songé à protester, la fillette saisissait la dépêche que le télégraphiste tenait à la main, et la tendant à son compagnon :
— Lisez, monsieur Midoulet ; ceci doit être intéressant !
L’employé, sa mission remplie, à sa croyance du moins, avait pivoté sur ses talons et reprenait le chemin de son administration, sans hâte intempestive. Marcel regarda sévèrement sa cousine :
— Emmie ! commença-t-il d’un ton grondeur…
Il ne continua pas. La petite, le défiant du regard, s’écriait :
— Veux-tu lire, oui ou non ?
— Mais le secret de la correspondance, tenta-t-il de répondre.
Elle haussa les épaules, fit sauter la bande gommée, et avec un aplomb déconcertant :
— Alors, je lis moi-même ; la correspondance d’un ennemi est toujours remplie d’enseignements.
D’un bond, elle se mit hors de la portée du jeune homme, bouleversé par son incroyable sans-gêne ; puis, tranquillement, elle parcourut la missive d’un regard attentif.
Après quoi, revenant à son cousin, elle lui glissa le papier dans la main :
— Lis à ton tour. Cela t’intéressera, je te le dis… Pour te décider, apprends que ceci émane du chef de la police anglo-égyptienne de Port-Saïd.
— Hein ? Le chef de la police anglo-égyptienne. Que veut-il ?
— Il répond au sieur Midoulet des choses très instructives.
— Il répond ? Midoulet lui aurait donc câblé ?
— Probablement. Mais lis, je t’en prie. Tu ne le regretteras pas, en dépit de tes scrupules.
Dominé par le ton de son interlocutrice, Marcel