Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Qu’eussent dit les voyageurs s’ils avaient su que cette avarie de machine avait été voulue par Midoulet, concertée par lui avec leur mécanicien.

Tout en effectuant la location du canot automobile de haute mer n° 2, l’agent avait acheté la conscience de Tomaso. Quelques lires (francs) aidant, la panne, qui arrêtait le canot n° 4 en vue de La Canée, avait été virtuellement décidée à Brindisi.

Lentement, l’embarcation se glissa entre les jetées du port crétois, pénétra dans l’un des bassins et vint accoster à quai.

— Combien de temps devrons-nous rester ici ? demanda l’officier au mécanicien, qui se livrait à une inspection plus minutieuse de son moteur.

D’un accent innocent, l’interpellé répliqua :

— Je ne pourrais vous fixer de suite, Excellence général ; quelques heures ou quelques jours, cela dépendra des moyens dont je vais disposer ici.

L’agacement du Japonais prit des proportions si inquiétantes que Tibérade proposa :

— Général, je vous en prie, distrayez-vous. Allez parcourir la ville avec Mlle Sika.

— Et notre homme, non surveillé, ne fera rien pendant ce temps.

— Je resterai pour veiller à cela.

— Avec moi, déclara gravement Emmie. Si cet Italien trompe nos quatre-z-yeux, je renonce à voyager !

Comme toujours, la gaieté de la fillette réagit sur ses interlocuteurs, si bien que l’officier japonais, après avoir résisté un instant, consentit à céder aux instances des Parisiens.

Au demeurant, il sentait lui-même la nécessité de chercher dans la distraction un dérivatif à son irritation.

Il s’éloignait déjà avec Sika, quand un appel de Marcel les fit se retourner brusquement.

— Le canot n° 2 !

La main du jeune, homme, tendue vers rentrée du bassin, expliquait les paroles.

L’embarcation de Midoulet, trop reconnaissable, hélas ! pour ceux que sa poursuite tracassait depuis tant d’heures, pénétrait entre les jetées, se dirigeant