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Il y eut on silence. Les deux hommes s’examinaient. Le Japonais avait l’intuition que son compagnon ne lui dévoilait pas le fond de sa pensée.

Il se préparait à l’interroger. Une exclamation d’Emmie lui coupa la parole.

— Eurêka ! clamait la fillette.

— Qu’as-tu trouvé ? demanda Tibérade, heureux de la diversion.

Elle eut ce sourire énigmatique qui fleurit sur les lèvres de toute fille d’Eve, sur le point de voiler la vérité, ce sourire fugitif, que le génie fixa sur la toile non moins fugitive de la Joconde, et légèrement :

— Rien, cousin. Je pensais à mes leçons de physique ; à la quatrième, tu sais, l’anecdote d’Archimède. Étant au bain, c’est-à-dire à un moment où nul agent n’eût pu le poursuivre pour port illégal d’uniforme, ce savant découvrit qu’un corps plongé dans l’eau perd un poids égal à celui du volume d’eau déplacé. Et alors, dans sa joie, il oublia son costume, ou plutôt son absence de costume, et se prit à courir dans les rues de Syracuse en criant : « Eurêka ! Eurêka ! » Voilà pourquoi j’ai répété Eurêka après lui.

Le général marqua un geste d’impatience.

— Laissons Mlle Emmie rêver au… décolletage d’Archimède, et poursuivons notre conversation beaucoup plus utile.

Mais ce fut la fillette qui reprit la parole :

— Vous voulez que mon cousin vous dise qu’il est trop courageux pour fuir une responsabilité, si lourde soit-elle ?

— J’avoue que c’est à peu près cela, grommela l’interpellé.

— Et que du même coup, il reconnaisse que ce n’est pas pour ce motif qu’il désire renoncer à être le chaperon du vêtement voyageur.

— Emmie ! supplia Tibérade sentant que la petite allait tout apprendre à l’officier japonais.

Mais l’appel demeura sans résultat.

La fillette répéta, imitant son cousin :

— Emmie ! Eh bien quoi, Emmie ? Emmie a hor-