Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aveu pénible. Fille de chambre, munie d’excellentes références (où les avait-elle prises ? mystère…), Véronique reconnut en moi une âme anarchiste.

— Toi, anarchiste ; toi, si pitoyable pour moi. Allons donc !

— J’ai pitié des misérables, mon petit Pierre ; mais je hais les capitalistes. Aussi, quand Véronique me parla d’une entreprise de fausse monnaie…

La pseudo-femme de chambre sursauta ;

— Elle a osé.

— Parbleu ! Et moi, j’ai accepté !

— Tu as… ?

Alcide plaisanta :

— Dame, quand on ne possède pas du vrai, il faut bien se contenter de faux… Toutes les coquettes te le diront. Je devinai tes répugnances probables. Il fallait t’éloigner. De là, ton engagement au Mirific, sous le nom de ma… complice, qui, une fois certaine que tu ne nous dérangerais pas, m’aboucha avec de faux monnayeurs de carrière…

— Oh ! balbutia Pierre Cruisacq avec épouvante.

— Ne te trouble pas, susurra son interlocuteur. Réserve ton émoi. Donc, deux jours après ton départ, les outils, instruments, métal étaient installés dans notre pavillon de la rue des Saules et la fabrication commençait.

— C’est épouvantable.

— Mais pas du tout. Ce qui l’est en réalité, c’est que Véronique Hardy avait manigancé toute l’affaire pour se mettre en bons termes avec la police. Pourquoi ? On ne le saura jamais.

— Il faudra bien qu’elle explique sa trahison…

Alcide secoua tranquillement la tête.

— Cela lui sera impossible. 

— Pourquoi ?

— Parce que, prévenus à temps, nous avons tiré au large. Pas si vite cependant que mes associés, gens à la main leste, n’eussent eu le temps de planter un couteau dans la poitrine de la délatrice et de la jeter à l’eau.

Pierre est un sourd gémissement et se cacha le visage dans ses mains.