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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

« Et alors, il a trompé le Mikado, trompé le chef du gouvernement russe. À chacun il a promis, contre la soumission à ses plans, la souveraineté future du continent asiate. En réalité, il veut leur neutralité bienveillante, qui pèsera lourdement sur les décisions de l’Europe ; il veut surtout accomplir son œuvre sans être troublé, quitte à jeter le masque plus tard, à lancer le Japon sur la Russie, à annihiler les deux nations par une guerre sans merci, durant laquelle celui qui a choisi le Drapeau Bleu comme étendard, parachèvera son ouvrage.

« C’est ici que ton serviteur, les genoux dans la poussière, te supplie de lui permettre, malgré les promesses du Mikado, fils du Soleil Levant, de se séparer de Dilevnor-Dodekhan.

— Et je le lui permis, car il parlait une langue chère à mes oreilles.

— Il disait ceci, fit doucement le bonze, suivant des yeux sur le papier, il disait :

« Je vénère une race qui a fait sienne la civilisation des gens d’Europe, qui s’est élevée du premier bond au niveau des plus fières armées, des plus redoutables marines… C’est elle qui doit être la tête de l’Asie émancipée, elle qui doit devenir son éducatrice. À tout groupement, il faut un chef. Toute confédération doit obéir à une race supérieure, sinon, c’est l’anarchie, les discussions intestines, la misère, les populations prêtes à subir le joug s’il ramène l’ordre.

« Cette tête, l’Asie la possède. Cette race supérieure, ô Impératrice, est celle que ta Douceur Bleue dirige. C’est elle que je veux voir commander sur le continent asiatique.

« Permets-moi de surprendre tous les fils de l’immense société secrète fondée par Dodekhan ; je suis son second, j’y parviendrai, et ensuite laissez-moi prendre sa place et diriger les événements au mieux de ta Gloire aux tons d’Aurore ?

— J’ai permis, redit la souveraine en relevant orgueilleusement le front. La grandeur du Japon était en jeu.