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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

trop curieux pour n’en pas faire l’objet d’une communication.

Et saluant de la tête, l’inconnu reprit son chapeau, déposé sur la banquette publique, et se dirigea vers la sortie.

Les deux délégués se considérèrent un instant :

— Non ! murmura, enfin le général.

— Non ! répéta le comte. Il n’y a pas à hésiter… C’est l’indication de voter « Non »… au sujet de la confédération asiatique.

— Absolument.

La sonnette présidentielle tinta soudain, invitant les congressistes à reprendre leurs places.

Tous obéirent et dans le grand silence rétabli, l’organe du président prononça lentement :

— Messieurs, l’opinion unanime est que les cinq représentants des États intéressés tranchent par un vote la question des États-Unis d’Asie.

Toute conversation avait pris fin. Ce fut au milieu d’une assemblée pétrifiée qu’un huissier recueillit dans une coupe les bulletins des délégués de France, d’Angleterre, d’Allemagne, de Russie et du Japon.

La coupe posée devant le président, celui-ci dépouilla le scrutin.

— Trois « non », contre deux « oui », fit-il enfin avec une nuance de regret ; la motion est repoussée et l’on s’en tient au statu quo.

— J’ai voté « oui », s’écria M. Léon Villageois, au milieu de la stupeur frissonnante de l’auditoire.

And I also (et moi aussi), appuya le délégué britannique.

— Messieurs, messieurs, clama le Président, le secret du vote doit être observé.

Mais le représentant français riposta d’une voix tonnante :

— Pas en cas, monsieur le Président. La France et l’Angleterre veulent que le public, que la presse, sachent bien quels gouvernements ont condamné les peuples à trembler encore devant le spectre de la guerre.

L’envoyé allemand voulut répliquer. Cela lui fut impossible. Des rangs du public monta en tempête une immense acclamation :

— Vive la France ! Vive l’Angleterre ! Disant assez que, de par toute la terre, on honnirait ceux dont les trois non avaient arrêté l’essor de