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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Pardon, Monsieur, la route d’Aubagne, je vous prie ?

— Tenez, Madame… Vous voyez ce kiosque là-bas… Eh bien, le tramway s’y arrête… Il vous conduira tout droit

— Très obligée.

Et prenant nerveusement le bras de sa jeune amie, l’impatiente Sara l’entraîna en disant :

— Allons, pressons-nous… Ah ! Mona, Mona… Vous êtes bien la vierge rêveuse du Nord. Si je vous laissais faire, nous serions encore demain sur le quai.

Cinq minutes plus tard, tirant toujours la fille du général Labianov après elle, la gentille duchesse s’engouffrait dans le tramway, étourdissant le conducteur de ses questions multiples.

— C’est bien le tram de la route d’Aubagne ?… Passez-vous près du bastidou Loursinade ?… À deux pas, très bien… Ah ! sur la route, en dehors de la ville… Bien… bien… Que dure le trajet ?

De fait, Sara ne tenait plus en place.

Il est vrai que dans le bastidou Loursinade, elle devait rencontrer le docteur Rodel, lui avait dit Dodekhan, le docteur Rodel, un homme de toute confiance, qui expédierait le câblogramme, dans des termes convenus dès longtemps avec le Turkmène.

Ainsi, le jeune homme avait voulu rendre impossible toute fourberie de ses adversaires.

Et la petite duchesse subissait inconsciemment l’impression que l’expédition de la dépêche déciderait la mise en liberté de Lucien.

Lucien, Lucien, dont tout son cœur, toute son âme étaient remplis. Pour arriver à ce résultat, il avait fallu bien souffrir… mais bah ! la souffrance était finie.

— Et autremain, vous voulez pas revenir avé ma voiture ?

Les voyageuses sursautèrent. Le conducteur était devant elles, goguenard.

— Nous sommes arrivés… té… tout le monde, il descend…

— Ah ! arrivées… la route d’Aubagne ?

L’homme allongea le bras :

— Là… cette route blanche.

— Et le bastidou Loursinade ?

— Pas loin du tout… Voyez là-bas, le lot d’oliviers… Eh bien, passez-le… et sur l’autre face, vous