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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Monsieur le duc de la Roche-Sonnaille veut-il me suivre ? prononça-t-il.

— Où donc ?

— Auprès du maître, qui désire l’entretenir.

Tous se regardèrent.

Log redemandait le Français qu’il avait quitté depuis une demi-heure à peine. Que signifiait cette soudaine sympathie pour son prisonnier ?

Lucien pensa que, pour l’apprendre, le mieux était d’obéir. Il eut un salut amical pour ses compagnons.

Puis, passant devant le serviteur, qui s’effaçait respectueusement :

— Où est le soigneur Log ? interrogea le duc.

— Au Pavillon des Larmes, Sahib. J’ai ordre de vous y conduire.

Dix minutes plus tard, les deux piétons débouchaient dans une prairie au centre de laquelle s’élevait une construction rectangulaire en bois laqué de vermillon et rehaussé de motifs dorés.

Du doigt, l’indigène désigna la porte, s’inclina profondément et rentra sous l’abri des arbres. Lucien marcha vers rentrée et poussa le battant qui tourna doucement sur ses gonds.

Le Jeune homme demeura immobile sur le seuil.

Un spectacle étrange s’offrait à sa vue. Des colonnettes, rouges comme les parois, comme les solives du plafond, comme le dallage recouvrant le sol, supportaient la toiture de l’édifice.

Au centre, sur une sorte de vaste réchaud, un liquide bouillait en une large bassine de cuivre. Et, tout à l’entour, des hommes bronzés, au torse nu, semblaient affiler des armes étranges : scies contournées, poignards serpentins, coins de fer et cent autres.

Plus loin, deux poteaux, enfoncés dans le dallage, se dressaient à quelques pas de distance.

Des travailleurs y fixaient d’épaisses bagues de fer, auxquelles étaient rivés de gros anneaux de même métal.

Et surveillant le tout, Log, juché sur les épaules de son athlétique San, qui portait son maître avec la même facilité qu’un enfant.

Lucien fut troublé par la vue du débris humain, écuyer fantastique de l’herculéen Graveur de Prières. Il crut voir un de ces mauvais génies dont se nourrissent les légendes populaires… Tout bas, il murmura avec un frisson :