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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

avec une formidable escorte, Log se dirige vers le sud. Nous le suivons, les yeux ouverts, les oreilles attentives, car nous regardons, nous écoutons pour vous.
.....« Zizi sait suivre une piste. Elle vous guidera vers nous. Ayez confiance en cette bonne bête.
.....« Les hommes trahissent, les panthères sont fidèles.
.....« À vous, Maître, comme le riz est à l’eau.

« Signé : Tzé, Master Joyeux. »

Les jeunes gens s’entre-regardèrent. Enfin, le duc s’écria :

— Allons vers le sud.

Et son compagnon l’interrogeant du geste :

— Monsieur, reprit Lucien avec une gravité soudaine, nous nous connaissons depuis peu.

— En effet… et peu librement, pourriez-vous ajouter.

— Cependant mon estime n’a pas hésité… Je suis certain que vous, représentant d’idées, d’intérêts opposés à ceux d’Europe, vous qui, les circonstances y poussant, pourrez nous devenir un adversaire redoutable, vous resterez toujours un soldat ; vous ne serez jamais un assassin.

Vers lui, Dodekhan tourna son visage loyal et répondit simplement :

— Regardez-moi.

— Oh ! je ne questionnais pas, croyez-le. J’exprimais ma conviction, conviction qui me fit à l’instant vous proposer de diriger nos pas vers le sud, vers ce Tonkin où mes compatriotes sont menacés par les projets sanguinaires de Log.

Puissance de la loyauté !

Ce patriote asiatique consacrant, après son père, son existence à l’émancipation d’une partie du monde, émancipation dont la première conséquence était l’élimination de la puissance européenne, cet homme devenait l’ami d’un Français, d’un adversaire naturel de ses projets.

Et ces êtres qui, faute de se rencontrer, de se connaître, eussent peut-être été d’inconciliables ennemis, s’unissaient dans une pensée de générosité commune.

— Sauvons celles que nous aimons ; sauvons les