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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Qu’est-ce donc ?

Il le comprit aussitôt. Au loin, sur la piste sillonnée d’ornières, zigzaguant à travers les terres, et que l’on dénomme « route », en pays chinois, un nuage de poussière s’élevait, se rapprochant rapidement.

— Un ennemi ! Les deux hommes prononcèrent ensemble ces quatre syllabes.

Mais, de suite, Dodekhan secoua la tête avec insouciance :

— Pas à redouter beaucoup… Quelque chose accourt vers nous. Quoi ? La poudre qu’il soulève ne me permet pas de le discerner ; seulement, il est certain que ce n’est point un détachement nombreux… et même…

— Et même, acheva Lucien, si j’en croyais mon expérience de chasseur…

— Dites ?

— Je croirais que le coureur est, sinon un chien, du moins un quadrupède d’un genre voisin.

Rassurés maintenant, ils continuèrent à fixer leurs regards sur les flocons poudreux dont les volutes roulaient vers eux.

— Ah çà ! grommela Dodekhan après un moment… aurait-on lancé un limier sur notre piste ?

— C’est précisément la question que je m’adressais.

— Ah ! vous remarquez…

— Que l’être suit absolument le chemin que nous avons suivi… Il a longé ce bouquet de bambous… que j’ai remarqués au passage… Tenez, à présent, il décrit une courbe qui va ramener vers ce treillage en espalier où j’ai cueilli une pêche… Tenez… tenez, que vous disais-je ?…

Très intrigués, les jeunes gens considéraient le nuage mouvant qui arrivait sur eux.

À présent, ils distinguaient vaguement une silhouette noire, imprécise dans le poudroiement soulevé par sa course. Tout disparut, masqué par les feuillages d’une plantation de tcha (arbustes à thé), dont les derniers arbrisseaux se dressaient à quelques pas de la cabane.

Et brusquement un animal jaillit des plantes, comme un projectile, décrivit une courbe dans l’air, s’abattit aux pieds du Turkmène. Celui-ci eut un cri :