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— Tendresse sans espérance, acheva tristement le baron, car votre père, d’Artin, fervent royaliste, ne consentira jamais à une union qu’il considérerait comme une injure.

— Jamais, répéta le gentilhomme, jamais.

Puis avec une brusquerie anxieuse :

— Alors, que voulez-vous de moi ?

Ce fut Talleyrand qui répondit :

— Je vais vous l’apprendre, d’Artin.

Le prince ouvrit la bouche, mais avant qu’il eût prononcé une parole, la porte tourna sans bruit sur ses gonds, et le chevalier de Roysset se montra sur le seuil.

— Excellence, fit-il doucement.

— Qu’est-ce, chevalier ?

— Un aide de camp de Napoléon.

— Que veut-il ?

— Vous ramener aux Tuileries… Le tyran désire vous entretenir.

Talleyrand eut un geste d’impatience.

— Je dois me rendre à l’invitation du maître, dit-il ironiquement.

Attendez-moi, mes amis… Vous, Dalberg, faites part à d’Artin de ce que le roi espère de son dévouement.

Et se tournant vers M. de Roysset :

— Quel est l’officier qui m’est envoyé… le connaissez-vous ?

— Oui, Excellence c’est le capitaine Marc Vidal.

— Lui… s’exclamèrent les assistants ?

Le prince de Bénévent eut un ricanement :

— Ma foi, c’est au mieux. Ce gaillard là ne me fatiguera pas de sa conversation durant la route, car les oreilles vont lui tinter.

Dalberg, de Vitrolles, d’Artin lui-même se prirent à rire.

— Allons, mon cher duc, parlez de ce jeune capitaine à notre ami d’Artin. Surtout ne le ménagez pas, ce petit officier de l’Ogre de Corse qui s’est introduit comme un voleur, dans le cœur de Mlle de Rochegaule.

Il pirouetta sur le talon de sa jambe la plus longue, et boitillant :

— À tout à l’heure… Je me laisse guider par le capitaine Marc Vidal.

Quelques minutes plus tard, le prince de Bénévent, rejoignait au salon d’attente l’officier rencontré la veille par Espérat Milhuitcent.

— Vous le voyez, Monsieur, dit-il, je me suis empressé. Si ma toilette est un peu négligée, c’est que j’ai pensé qu’avant toute chose, il fallait éviter de faire attendre Sa Majesté l’Empereur.