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rope ; vous n’y parviendrez qu’en tenant tête à Napoléon[1]. Bonaparte a pardonné !

Elle s’arrêta. Milhuitcent courbé en un salut plein de vénération murmurait :

— Vous aussi avez pardonné, Madame.

Elle le regarda surprise, puis comprenant soudain :

— Le divorce, veux-tu dire, petit… ; mais la raison d’État l’exigeait… Et puis étais-je digne de lui. Va, il m’a pardonnée souvent… il est resté bon pour moi… pour moi que le ciel, moins clément, a frappée en m’interdisant de lui donner un héritier.

Mais soudain un remue-ménage se produisit dans le palais… ; on courait dans les couloirs, des exclamations parvenaient jusqu’à la chambre de Joséphine.

— Que se passe-t-il donc, demanda-t-elle en faisant un pas vers la porte ?

À ce moment, celle-ci s’ouvrit brusquement. Une suivante parut essoufflée et lança d’une voix haletante :

— L’Empereur… il vient d’arriver avec un officier d’ordonnance.

— Lui !

Joséphine courut aux jeunes gens, leur serra les mains :

— Partez vite… Je vais lui parler… Cette fois, le danger est trop grand ; il faut qu’il punisse.

Mais se ravisant :

— Lui parler de quoi ?… je n’ai aucun détail… tenez-vous ici près, je vous ferai appeler.

Ils se dirigeaient vers la porte.

Une voix se fit entendre au dehors qui les cloua sur place.

— L’Impératrice est dans sa chambre… merci.

Simples étaient les mots, mais l’organe étrange, caressant et métallique, fit battre le cœur d’Espérat et de son compagnon.

Indécis, ils consultèrent Joséphine du regard.

— Trop tard, murmura celle-ci, il vous rencontrerait.

Et les poussant derrière un grand paravent blanc à monture dorée, sur les panneaux duquel se détachaient des J. surmontés de la couronne et soutenus de faisceaux de licteurs à l’Aigle Impériale.

— Tant pis s’il se fâche… vous êtes de braves gens et vous l’aimez comme moi.

  1. Mémoires du prince de Metternich.