CHAPITRE XII
Pourquoi la France perdit la frontière du Rhin.
De la Mer du Nord à Lauterbourg
Sur la rive gauche de l’Aisne, dans une plaine riante entourée de collines, Soissons dressait ses murailles.
Par-dessus les glacis, on apercevait, pointant vers le ciel, les flèches et tours de l’église cathédrale Notre-Dame, de l’abbaye en ruines de Saint-Léger des Génovéfains, de Saint-Pierre au Parvis.
Comme garnison, 1,000 fantassins polonais sous les ordres du vaillant colonel Kozynski, une section de soldats du génie, commandés par le lieutenant colonel Saint-Hellier. C’était peu ; mais les remparts étaient solides, les combattants aussi, et la ville eût pu sans peine résister quelques jours à un siège en règle.
Napoléon ne demandait que vingt-quatre heures, et Blücher serait écrasé, son armée détruite, la France délivrée.
Hélas ! dans l’histoire des peuples, certaines minutes sont voilées de crêpe.
Parmi les défenseurs de Soissons, un seul était faible, irrésolu, inintelligent, et celui-là était le chef suprême : le général Moreau.
Contrairement aux instructions de l’Empereur, il n’avait fait ni raser les faubourgs gênant la défense ni miner le pont jeté sur l’Aisne, afin de le détruire s’il reconnaissait l’impossibilité de le fermer aux alliés.
Or, le 2 mars, au matin, deux masses ennemies s’étaient présentées devant la cité. L’une formée d’environ 30,000 hommes, conduite par Bulow, arrivait de Belgique par la rive droite de l’Aisne ; l’autre forte de 20,000, longeait la rive gauche, amenée de Reims par le général Wintzingerode.
Les deux officiers ennemis comprenaient l’importance capitale de la ville. Pour Blücher, elle était l’issue qui lui permettrait d’échapper à l’étreinte de l’Empereur ; pour eux, la prise de Soissons, les tirerait de