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— Tu vas comprendre parce que je le veux.

Puis lentement, mettant en sa voix tout l’héroïsme de sa jeune âme :

— Le comte est certain que tu es son fils, ce lui est un bonheur, une consolation. En lui enlevant cette croyance, sans lui assurer la certitude que je suis l’enfant jadis enlevé par d’Artin, tu lui causerais un déchirement de plus… Le doute lui serait plus cruel que le mensonge.

— C’est vrai ! c’est vrai ! balbutia de Mirel.

— Écoute donc, frère de douleur, un même devoir filial nous rassemble… Je dois rester étranger à celui qui peut-être est mon père… Tu dois rester le fils de l’homme qui n’est pas ton père.

Mais changeant de ton.

— Onze heures moins un quart. Il faut que je me rende chez le maréchal. Au revoir, Henry, toujours mon frère… Ayons au cœur un même amour pour l’honneur de Rochegaule… Agissons de telle sorte que, quel que soit l’avenir, le comte puisse être fier de chacun de nous.

Les jeunes gens échangèrent une longue accolade, et Espérat quitta son compagnon. Il avait les yeux humides, mais le cœur léger. Descendant ou non des Rochegaule, le brave enfant sentait qu’il venait de faire tout son devoir.