Page:Ivoi - La Mort de l’Aigle.djvu/142

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’ai pas su défendre Lucile… je n’ai plus d’honneur, n’ai plus de fille.

Pensif, il revint au salon, parlant à haute voix, ainsi qu’en un rêve éveillé :

— François d’Artin a méprisé ma volonté… Henry de Mirel m’a abandonné… je n’ai plus de fils.

Et se laissant tomber dans le fauteuil où il gisait tout à l’heure, il bégaya :

— Gentilhomme déshonoré… père sans enfants… que dois-je faire ?

Un moment de silence, puis il ajouta avec force :

— Mourir.

Ses traits exprimèrent une sombre résolution. Lentement, méthodiquement, il examina son arme, s’assura qu’elle était bien chargée. Après quoi, il s’appuya commodément contre le dossier du fauteuil, pencha légèrement la tête en arrière, et introduisant le canon de sa carabine dans sa bouche, il murmura :

— Adieu !

Sa main droite descendait le long du fusil, tâtonnant pour trouver la gâchette. Ses yeux grands ouverts, se fixaient sur le plafond peint en ciel bleu où se trémoussait une ronde rieuse d’amours joufflus.

Et soudain il frissonna… éloigna de lui l’arme de chasse et resta là, regardant. — Qu’avait-il donc vu ?

Les amours balançaient des écharpes blanches et roses et ces deux couleurs, sur le fond d’azur, venaient de donner au vieillard l’impression du drapeau que la nouvelle France avait substitué à l’éten-