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L’AÉROPLANE-FANTÔME

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Tout près de Wimbleton, dans cette ravissante banlieue de Londres, sise entre les parcs de Richmond et de Wimbleton, se trouve une délicieuse villa moderne, cottage par la disposition, l’architecture, château par les dimensions de l’habitation et du domaine qui l’entoure.

La propriété est désignée sous le nom de Fairtime Castle — Château Fairtime, — le maître de céans étant lord Fairtime, l’un des plus puissants industriels du Royaume-Uni.

Il est des patronymiques prédestinés. Fairtime est évidemment du nombre[1], car la gaîté règne dans le domaine.

Depuis lord Gédéon Fairtime, grand, mince, distingué et souple malgré ses cinquante ans sonnés, avec son visage énergique et bon complètement rasé, jusqu’à sa fille Édith, ravissante blondinette de dix-huit printemps, en passant par Péterpaul et Jim, frères d’icelle, robustes et élégants sportsmen, qui venaient d’accomplir respectivement leur 25e et 23e années, tout le monde était joyeux dans la famille.

À cette heure même, de bruyants éclats de rire retentissaient dans le cours du tennis… où se déroulait un Gimkana.

Tout le monde connaît le Gimkana, cette sorte de cotillon de plein air, imaginé en Amérique par les Smartset, les quatre cents multimillionnaires de la 5e Avenue.

Ici, miss Édith, ses frères, et quelques amis de leur âge, avaient organisé, sous les regards amusés de parents plus graves, une course egg in spoon — œuf en cuiller. Chacun des coureurs tenait à la main une petite cuiller à café, dans laquelle il devait maintenir un œuf en équilibre.

Lord Gédéon Fairtime, oubliant la Chambre Haute et le souci des affaires, encourageait les coureurs, s’amusant, avec ce laisser-aller enfantin qui caractérise la bonne humeur britannique.

Soudain, un laquais dont le visage et l’attitude indiquaient un âge assez avancé, se montra, et s’approchant du lord, murmura respectueusement :

— On désire téléphoner à milord, à milord en personne.

— Qui ? interrogea l’industriel, évidemment fâché d’être dérangé.

— Je l’ignore… On m’a seulement dit que l’on voulait vous consulter sur deux points importants.

— Deux points !

M. Fairtime répéta ces mots avec un tressaillement.

  1. Pour les lecteurs qui ne parlent pas l’anglais ; calembour sur le sens littéral du nom propre Fairtime, que l’on peut traduire par joli temps.