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LE VOLEUR DE PENSÉE.

— Allô, allô, qui appelle ?

— Déclenchez la plaque à vue, lui fut-il répondu. Les noms ne signifient rien.

— C’est juste ! C’est juste ! Excusez-moi.

Auprès de l’appareil, un bouton poussoir de cuivre se distinguait.

Le gros homme y appuya son index. Alors un petit panneau d’apparence métallique s’abattit sur le mur avec un claquement sec.

C’était une plaque sensible de téléphote, appareil usité dans certaines grandes administrations allemandes et qui transmet les images comme le téléphone transmet les sons.

Une silhouette se dessina aussitôt sur la plaque. Mais à peine l’eut-il vue que Von Karch la cacha de ses deux mains étendues en clamant :

— Cela ne doit être vu de personne, de personne… Marga, sortez, ma chérie, je vous en prie… laissez-moi seul.

La jeune femme se mit à rire.

— Bon, je sors… Mais je sais qui vous parle… Trop facile à deviner.

La porte retombant sur elle, empêcha le père de relever l’ironie de ces paroles.

Il était seul… Et démasquant la plaque, courbé en deux, dans une attitude de respect servile, il reprit le parleur, murmurant :

— J’écoute… j’écoute… bouleversé par l’honneur.

— Je sais votre dévouement… venons au fait… On vous a parlé de ce jeune Français ?

— François de l’Étoile… cet enfant trouvé, ce sans-nom, qui s’en est fait un de la place de Paris où l’Assistance publique le recueillit.

— L’Assistance publique a recueilli un aigle. Il faut que cet homme soit à nous… Carte blanche pour agir et, en cas de succès, je vous autorise à vous montrer aussi exigeant que possible…

— Oh !…

Von Karch se prosterna presque. Mais une sonnerie tinta. Toute image s’effaça de la plaque du téléphote, et cependant le gros Allemand demeurait, courbé et rayonnant, devant l’appareil à présent muet.