Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/468

Cette page a été validée par deux contributeurs.
455
LE LIT DE DIAMANTS.

Il regarda François.

L’ingénieur le considérait avec tristesse. Sur le front de celui qui avait tant souffert par sa faute, on ne lisait pas la haine.

Un espoir illumina le cerveau du fourbe ; un espoir imprécis. Les coquins savent que l’infériorité des honnêtes gens est la bonté. L’espion entrevit une indulgence possible, et, réconforté par cette idée :

— J’écoute, dit-il.

— Bien, reprit lentement son interlocuteur. Des dévoués ont fait tourner à votre confusion ce qui devait assurer ma perte. Grâce à mon appareil aérien dont ils avaient la conduite, ils ont transporté sur le Fraulein des hommes du Lovely ; vos complices, leurs canots coulés, ont été précipités à la mer, alors qu’ils se préparaient à monter à bord. Tous ont expié, sauf Tafsen qui a préféré aider mes fidèles à vous tromper.

— Ah ! siffla l’espion ; je me souviendrai de cela.

François coupa l’exclamation haineuse :

— Ne songez qu’à vous, herr Von Karch ; cette nuit, engourdi par l’opium mélangé à votre boisson, vous avez été amené ici, ainsi que vos captifs, ainsi que les pierres précieuses du malheureux Tiral, pierres sans valeur pour lui, à présent que sa fille n’est plus. Votre navire le Fraulein a été fulguré au moyen de mes radiateurs hertziens. De son équipage, vous et Tafsen seuls survivez. Tafsen a obtenu sa grâce ; je voudrais vous gracier à votre tour.

Un frisson parcourut le corps de l’Allemand.

— Me gracier ? répéta-t-il d’une voix frémissante.

— Oui, vous pardonner en faveur de la malheureuse enfant que vous aviez condamnée comme nous, uniquement parce qu’elle avait eu horreur du crime.

— Ah ! c’est Margarèthe qui vous incite à la pitié.

— Je viens de vous le dire.

— Alors je ne vous remercie pas, herr François ; seulement qu’appelez-vous le pardon ?

— C’est vous débarquer dans un port, ignoré, c’est vous donner la possibilité de recommencer la vie.

— Bigre, c’est tentant.

Les yeux du misérable pétillaient.

— Et vous ajouteriez bien quelques diamants à la liberté ?

François inclina la tête.

— Vous dites oui ; alors achevez ; votre générosité s’adorne certainement de quelques conditions.