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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Heureusement, il n’y a pas de pirates dans ces mers, reprit le second.

Et son supérieur l’interrogeant du regard.

— Bien sûr, expliqua-t-il. Pour que la lagune ne demeure pas sans surveillance, nous expédions la relève, et les autres ne rallient le bord qu’à l’arrivée de celle-ci… Deux fois par jour, durant une grande demi-heure nous sommes seuls sur le Fraulein… Avouez que des gens mal intentionnés auraient beau jeu de capturer le yacht.

— Vous avez raison… Toutefois, comme vous le dites si bien, lieutenant, il n’existe pas de pirates.

— Cela est évident.

— Et le beau jeu de ce qui n’existe pas ne saurait nous inquiéter.

Herr Tafsen daigna souligner d’un sourire ce qu’il considérait comme une fine plaisanterie, et les deux canots rangés contre le bordage étant prêts à partir, les rameurs à leurs bancs, il commanda :

— Nage !

Un instant, il regarda les embarcations s’éloignant dans la direction de la côte, que l’on devinait, dans la nuit venue, aux lumières du port de Progreso.

Puis s’adressant à son second :

— Je descends dans ma cabine, lieutenant. Quand les hommes de l’équipe de jour seront rentrés, placez les vigies et venez me rejoindre. Nous nous offrirons un punch de consolation.

— Par obéissance, Herr Tafsen.

Sur ce, le capitaine du Fraulein s’engouffra dans l’escalier du pont et s’enferma dans sa cabine, où il s’absorba en la confection d’un punch à lui spécialement destiné.

Il est conforme à la hiérarchie bien comprise que le commandant d’un navire prenne un rafraîchissement, une délicatesse, avant les officiers subalternes.

Celui qui précède tout le monde au feu, peut bien brûler l’alcool avant les autres.

Donc Herr Tafsen mixtura la boisson ardente, en dégusta une gorgée avec une sensualité presque mystique, puis s’étant quelque peu grillé la langue, il vint au hublot dont la vitre ronde éclairait la pièce durant le jour.

Vu la nécessité de réserver au « patron du yacht » et à ses invités, volontaires ou non, les cabines d’arrière, le commandant s’en était amé-