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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Pas de questions ; trop dangereux. Prière de Miss Veuve : une fois embarquée sur le canot qui vous conduira vers la terre, Miss Édith devra se tenir debout à l’arrière.

— Pourquoi ?

La question tomba dans le vide. Manuelito s’était éloigné, et sa silhouette disparaissait sous le couloir de la passerelle.

Comme pour marquer un éloignement soudain aux passagères, le jeune garçon gagna l’avant du navire, et s’asseyant sur un rouleau de cordages, il parut s’endormir.

Une heure environ, il demeura ainsi. Un bruit de rames arriva jusqu’à lui.

— Voilà les drôles qui reviennent ; je voudrais bien savoir quelle louche besogne ils ont accomplie. Enfin, faisons le signal.

Il s’était mis debout ; d’un étui il sortit une cigarette, la plaça entre ses lèvres et murmura encore :

— Il n’y a pas le moindre vent, c’est parfait !

Il se pencha sur le bastingage. Un craquement se fit entendre, et une petite clarté brilla. Le gamin venait d’enflammer une cerilla (allumette bougie).

Un instant il la tint au bout des doigts, puis il la lâcha ; la mince baguette de cire décrivit une trajectoire et s’éteignit dans la mer.

Deux fois encore, le singulier fumeur répéta la manœuvre. Seulement de la dernière « cerilla » il avait allumé sa cigarette. Après quoi, il s’accouda sur le bastingage et chuchota :

— Le patron sait que nous allons filer d’ici.

L’embarcation qui ramenait les complices de Von Karch accostait à ce moment. Du pas nonchalant d’un désœuvré, Manuelito se rapprocha de la coupée.

Von Karch s’y trouvait déjà. Aux hommes qui remontaient sur le pont, il demanda :

— C’est fait ?

— Oui, répondit Pétunig.

— Sans difficulté ?

— Pas la moindre. Ces gens-là sont la providence des gaillards comme nous. Pas un veilleur ; il faut que les paresseux soient bien naïfs dans ce pays. On emporterait les docks et les entrepôts sans qu’une mouche criât à la garde.

— Et l’essence ?