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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Le señor, se hasarda enfin à dire ce dernier, est bien sûr du sens de ce qu’il me charge de transmettre ?

— Absolument sûr, répliqua l’Américain s’amusant de la curiosité visible de l’agent.

— Parce que, une communication de ce genre, vu l’impossibilité d’en contrôler le sens, ne saurait, en cas d’erreur ou d’omission, engager la responsabilité de l’administration.

— D’accord, señor. Toutefois, on peut réduire les chances d’erreur. Si vous le permettez, je vous dicterai ce télégramme, tandis que vous le transmettrez.

La proposition devant diminuer son travail personnel, l’employé accepta et s’installa à son transmetteur électrique, non sans pester à part lui contre les humains atteints de cette manie perverse de s’exprimer en chiffres, mettant ainsi les honnêtes gens dans l’impossibilité de comprendre ce qui ne les regarde pas.

Pour Tril bien entendu, la missive, établie suivant une règle convenue à l’avance et consistant à relever les mêmes mots dans deux livres identiques, dont l’un se trouvait en la possession du gamin et l’autre dans la cabine du capitaine Martins, cette missive était claire. Elle signifiait simplement :

« Au reçu de ma dépêche de Weeneborg, vous avez certainement quitté Plymouth pour vous rendre sur rade, à Campêche. Le vapeur Fraulein vous rejoindra, car c’est là le seul bon mouillage de la côte.

Le surveiller sans qu’il s’en doute, de nuit comme de jour. Ne pas le perdre de vue. »

L’expédition achevée, le gamin solda le montant de la dépêche, ajouta un pourboire, que les agents Yucatèques acceptent volontiers, et dont la largesse rendit toute sa bonne humeur au bénéficiaire de la munificence, puis sifflotant un Yankee doodle (chant américain) très patriotique, le jeune garçon se lança à travers la ville.

Tout en déambulant, il notait la situation des monuments, celle de la gare terminus de la petite ligne de Mérida à Progreso ; il marqua une courte halte dans une fonda (hôtel) où il se fit servir un déjeuner, composé de mets exécrables, importés, au temps de la domination espagnole, dans la cuisine du Yucatan. Après quoi, il reprit lentement le chemin de la Poste.

— M. de l’Étoile grondera. Il m’avait ordonné de garder la machine. Bah ! dans un pays certainement rempli d’agents du Von Karch, à deux on est deux fois plus fort.